FILM: ATELIERS D'ARTISTES, UN DOCUMENTAIRE DE SYLVAIN DESMILLE.




Sylvain Desmille chez et avec le peintre Philippe Pasqua dans son atelier.





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Film documentaire de Sylvain Desmille 
(auteur-réalisateur).



Le film a été décomposé en cinq parties d'environ 10 minutes chacune.






Partie 1: Les ateliers chics des peintres académiques au XIXe sicle (Musée de la vie romantique) et les ateliers des impressionnistes (Claude Monet à Giverny).






Part 2: dans l'intimité de l'artiste Claudine Drai (Belleville), La cité des Arts (Montmartre) et l'atelier de Nicolas Schöffer (l'atelier comme monstration).









Part 3: Les collectifs d'artistes:La Ruche à Montparnasse (avec Ernest Pignon-Ernest, Anna Foka, Philippe Mougey) et Le Bateau Lavoir à Montmartre  (avec Anne Claire Lourenço).







Part 4: Dans l'intimité de Philippe Pasqua, la dimension muséale publique (ateliers Bourdelle et Zadkine) et privée (Atelier Bouchard, qui a disparu aujourd'hui).







Part 5 et fin:  les ateliers pour apprendre (L'Académie de la Grande Chaumière), l'atelier Foujita, l'atelier Orloff.







La problématique des ateliers d’artistes renvoie à celle de la création. Dans l’imaginaire collectif, cristallisé et véhiculé notamment par les biopics hollywoodiens sur les peintres, l’atelier apparaît comme un espace secret, un antre mystérieux, alchimique, magique, et presque religieux, dans lequel l’artiste - forcément bohème - donne libre cours à son génie en se livrant aux affres de la création. Dévoiler cette intimité s’apparente à une sorte d’interdit ! comme si cela rabaissait l’oeuvre dès que l’on connaissait les secrets de sa fabrication.

En fait, cette conception romantique est bien éloignée de la réalité. L’atelier de l’artiste est tout à la fois le lieux du faire et de la communication. Que ce soit au XIX ème siècle ou aujourd’hui, il apparaît comme un point de rencontre personnelle entre l’artiste et le collectionneur, le galeriste, ou l’institution: là où l’oeuvre d’art se donne à voir pour la première fois, où les mots se partagent, où les points de vue s’échangent. Et d’ailleurs, quelle est la nature de notre regard lorsque l’oeuvre se dévoile dans ce contexte si particulier de l’atelier, bien différent de celui de l’espace d’exposition comme celui de la Galerie ou du Musée ? Existe-t-il des correspondances ou non ? L’atelier participe-t-il d’une sorte de mise en scène permettant à l’oeuvre en contexte de se donner à voir autrement, originellement ? En ce sens, l’atelier de Giacometti, de Bacon nous apparaissent autant des espaces de représentation que de création dans la mesure où ils représentent pour nous la création en action. A chaque époque, son regard et ses préoccupations. Ainsi, Scheffer avait construit un second atelier dissocié de l’espace de création pour présenter ses oeuvres à son public. 

L’atelier d’artiste est également un lieu où se forgent les directions et les concepts de l’histoire de l’art. Au XIX ème siècle, l’atelier est le lieu de la pensée artistique en action. On y tient salon et on y débat. Dans l’atelier de Delacroix ou de Courbet se retrouvent non seulement les artistes, mais aussi les écrivains, les poètes, les journalistes, les politiques... Au XX ème siècle, la densité des ateliers d’artistes a favorisé l’éclosion de courants et d’écoles artistiques (comme le cubisme, le surréalisme, l’abstraction...), ne serait-ce que par échanges et points de contacts. Cette dimension semble s’être atténuée au nom des principes d’individualité et de personnalisation. La préoccupation de faire corps reste toujours constante et d’actualité, comme en témoigne l’éclosion des collectifs d’artistes pour “légaliser” des squats, ou pour défendre des cités telles que la Villa des Arts qui suscita dernièrement l’intérêt spéculatif des sociétés immobilières, avant d’être rachetée par la Mairie de Paris.

En effet, si l’atelier d’artiste participe de la mythologie d’une ville comme Paris, c’est bien parce qu’il a participé à sa dynamique et à son développement. Les quartiers dits artistiques furent longtemps des espaces du redéploiement urbain. Réputés peu cher, ils ont attiré les pauvres peintres bohèmes qui en ont fait malgré eux des lieux réputés et donc attirants pour les catégories sociales plus élevées (on observe le même phénomène aujourd'hui avec le phénomène "bobo, la posture en avant mais l'art en moins).  Il existe également à Paris des correspondances entre l’essor d’un quartier et les courants artistiques en vogue, comme ce fut le cas pour les deux grands pôles de Montmartre (autour du Bateau-Lavoir) et de Montparnasse (autour de la Ruche), mais aussi de la Nouvelle Athènes dans le IXe arrondissement  ou du Parc Montsouris. A ce titre, les ateliers d'artistes ont profondément marqué l'architecture parisienne comme en témoignent les grandes verrières et la double hauteur sous plafond. Aujourd'hui, la construction d’ateliers, souvent du ressors de la Ville, participe plus d’une sorte de reconversion, à l’instar de ceux des Magasins Généraux, associés à une résidence universitaire...

Même si de gros efforts sont réalisés, la demande excède de beaucoup l’offre. En fait, si posséder un atelier est si important, malgré le poids économique qu’il représente, c’est qu’il participe au statut même de l’artiste en lui permettant de se faire reconnaître en se faisant connaître, en pouvant accueillir et montrer son travail entre deux expositions. L’espace accordé à l’artiste peut également faire évoluer sa création - via le format par exemple, la possibilité de stockage ou d’expérimenter des installations. Pour d’aucuns, le changement d’atelier renvoie presque à un rite de passage d’une phase à l’autre de leur création. Pour d’autres au contraire, il est très difficile de changer d’espace. Mais pourquoi est-il si important d’avoir un atelier à Paris ou dans sa région à l’heure de la mondialisation ?Par souci de visibilité ? Parce que Paris garde une place importante sur le Marché de l’Art ?

Pour répondre à toutes ces questions, j'ai choisi non seulement d'interroger l'historien d'art Philippe Gaussen , les conservateurs des ateliers-musées Bourdelle, Zadkine ou Foujita, mais aussi d’écouter des artistes contemporains, comme Claudine Drai, Anna Foka, Ernest Pignon-Ernest, Philippe Mougey, Philippe Pasqua. 

La parole de ces artistes s’intègre à une perspective historique des ateliers d’artistes de Paris et de la Région Ile-de-France, en mettant en évidence les aspects architecturaux, les enjeux artistiques, économiques, sociaux et humains liés à l’implantation des ateliers d’artistes, hier et aujourd’hui. Le film met également en relief le rapport entre la création personnelle, l'intimité de l'artiste et le collectif représenté par les cités d'artistes (La Ruche, le Bateau Lavoir, la Villa des Fusains, le Villa des Arts, la Cité fleurie...). Ce faisant, il révèle et valorise un patrimoine méconnu qu’il s’agisse d’ateliers-musées (musée Bourdelle, Zadkine, hôtel Scheffer à Paris), de fondations (maison de Claude Monet à Giverny, la Ruche à Paris) ou encore privés (ateliers Bouchard à Paris, Foujita à Villiers-le-Bacle, la Grande Chaumière...). 


Le film a été réalisé et diffusé par France 3 en 2007. Il a été sélectionné par le Festival International du Film d'Environnement (hors compétition). Je joins quelques critiques parues dans Télérama et le Nouvel Obs. Il fut annoncé et qualifié de "petit bijou" par Isabelle Morini-Bosc sur Europe 1.


CRITIQUE LE MONDE / TELERAMA n°3062.

  


Documentaire de Sylvain Desmille (France, 2008). 55 mn. Inédit


Dans la genèse d'une oeuvre, le lieu de naissance est souvent déterminant. Ainsi, sans sa maison de Giverny, dans le Bocage normand, Claude Monet n'aurait sans doute jamais peint sa série des « Nymphéas » à la demande de son ami Georges Clemenceau pour le musée de l'Orangerie. Entre les cités-ateliers de Montmartre, où séjournèrent Gauguin, Maillol ou encore Bouchard, et les ruelles de Montparnasse, quartier préféré des artistes des Années folles, c'est à une balade dans le Paris des peintres et des sculpteurs que nous convie ce documentaire.

Une balade un peu particulière puisqu'elle se propose de sonder l'insondable, à savoir les mystères de la création artistique à travers les lieux où elle prend vie, dans l'intimité des peintres et des sculpteurs. Comme en témoigne la plasticienne Clau­dine Drai, un atelier « n'est pas un endroit normal. [...] C'est comme entrer en moi ». Une intrusion qui permet au visiteur d'être au plus près des intentions de l'auteur. Au détour de jolis hôtels particuliers et d'immeubles entièrement voués à la créa­tion, on apprend ainsi que les impres­sionnistes orientaient leurs ateliers au nord afin de modifier l'intensité de la lumière sur leurs toiles.

Le réalisateur évoque justement la condition d'artiste, et pose en creux la question essentielle de l'espace de création alors que les ateliers historiques disparaissent peu à peu, transformés en musées.

Emilie Gavoille
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TELE OBS: 




Retour sur la grande aventure des ateliers d'artistes de Paris, du XIXe siècle à aujourd'hui, à travers des témoignages de créateurs mondialement reconnus.
Le documentaire évoque l'évolution des ateliers d'artistes de Paris, du XIXe siècle à aujourd'hui, de la Nouvelle Athènes au squat artistique de la Générale, du Bateau-Lavoir à Montmartre aux cités d'artistes de Montparnasse, en passant par la maison de Monet à Giverny et celle, bijou secret, de Foujita à Villiers-le-Bâcle. Une aventure commentée par des créateurs de renommée mondiale, comme Anne Foka, Paul Collomb, Ernest Pignon-Ernest, Claudine Drai, Philippe Mougey et Philippe Pasqua. Ces artistes abordent de manière sensible et intime la question du lieu artistique dans ses problématiques de création. Plongée au coeur de ces lieux mythiques, où travaillent peintres, sculpteurs, photographes et plasticiens, là où l'oeuvre d'art s'élabore et se métamorphose, bien loin des galeries et des musées.
La critique
Pénétrer dans l'atelier d'un artiste, c'est entrer dans son monde et approcher de près le mystère de la création. Plongeant au coeur du Paris bohème, le documentaire de Sylvain Desmill retrace l'histoire de ce lieu d'exception et lève le voile sur un patrimoine culturel souvent méconnu.
Hôtels particuliers, bicoques misérables ou demeures ombragées... Du XIXe siècle à nos jours, les artistes ont investi des lieux divers. Vers 1820, le mouvement romantique envahit d'abord le 9e arrondissement, cette «nouvelle Athènes» où se côtoient salons mondains, lieux d'apprentissage et salles d'expositions... Puis c'est l'explosion des cités artistiques, qui accueillent peintres et sculpteurs en devenir. La Cité fleurie devient le repaire de Maillol et de Gauguin; la Villa des Arts, celui de Renoir et de Picabia. A chaque courant son quartier : entre 1860 et 1913, plus de 500 rebelles à l'art académique fréquentent la rue Corto ou le Bateau-Lavoir de Montmartre. En 1910, Montparnasse devient à son tour le coeur d'une vie sociale excentrique et joyeuse.
De ces migrations, il ne reste aujourd'hui que d'immenses verrières décorant les façades des immeubles parisiens. La fin du XXe siècle a signé la mort des ateliers au profit des studios, gérés chichement par la municipalité. Quant aux artistes, ils ont trouvé, dans les squats, un nouveau terrain d'expression.






Les pinceaux de Foujita.




















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